Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Wadjda

Au moins pour ce que représente le film, Wadjda est important et presque emblématique. Premier film saoudien réalisé sur place (à Riyad, la capitale) et par une femme dans un pays ultraconservateur, pas vraiment respectueux à l’égard de la gent féminine (le tournage a parfois été difficile pour Haifaa Al Mansour, obligée de se cacher dans un van et de réaliser à distance) et bénéficiant d’une production cinématographique quasi inexistante, Wadjda est un bel effort "d’ouverture" des mentalités, ne serait-ce que dans sa raison d’être et dans son sujet. Sujet engageant racontant l’histoire d’une jeune fille de dix ans un peu rebelle (elle porte des Converse, traîne avec un garçon, refuse de porter l’abaya…) et qui s’obstine à vouloir s’acheter une bicyclette quand le vélo est interdit aux femmes (parce que considéré comme impur et défavorable à la procréation).

Sans juger ni offenser (mais les limites imposées par la censure saoudienne sont visibles et paraissent inévitables : le film cherche plus ou moins le consensus, ni trop aseptisé ni trop virulent, alors qu’on pouvait préférer un parti pris plus prononcé, mais était-il seulement envisageable ?), Haifaa Al Mansour fait de Wadjda (étonnante Waad Mohammed) un symbole de la femme libre, en tout cas cherchant à s’émanciper davantage. Si l’on apprend rien de nouveau sur la condition féminine en terre musulmane (poids des traditions et de la religion, polygamie, répudiation, dépendance matérielle, mariage arrangé et/ou forcé dès dix ans…), il est toujours bon de rappeler la sévérité, et parfois l’inhumanité, de cette condition imposée par une société férocement patriarcale qui relègue ses femmes derrière les murs et sous les voiles.

Certes, le propos est honnête, sincère, inattaquable (et forçant le débat, suscitant les questions), mais alors pourquoi a-t-on cette vague impression de sans cesse regarder du world cinema propret et didactique, prompt à satisfaire, à émouvoir, à indigner aimablement la masse occidentale toute contrite dans son pop-corn (et la critique par la même occasion qui s’est un peu trop emballée sur ce coup-là) ? En termes esthétiques, c’est assez simple, voire assez pauvre, encore que les rues désertes et l’ambiance singulière d’une ville abandonnée à la chaleur et au vent, à la poussière et à des silhouettes noires errant comme des fantômes, produisent à la longue un sentiment d’étrangeté au quotidien. Fable universelle, conte gentillet sur le désir de liberté, Wadjda, porteur d’espoir et de tolérance, est une œuvre attachante qui souffre d’un trop de bienveillance.

Wadjda
Tag(s) : #Films

Partager cet article

Repost0