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Argo

Troisième long-métrage pour Ben Affleck qui s’inspire ici d’un dossier récemment déclassé aux États-Unis, l’opération "Canadian caper", révélant publiquement l’offensive de la CIA et des autorités canadiennes pour libérer, clandestinement, six Américains réfugiés dans l’ambassade canadienne lors d’une prise d’otages de l’ambassade américaine à Téhéran survenue en novembre 1979. On pouvait craindre une œuvre-dossier rébarbative à la Syriana (d’autant que Clooney produit la chose) ou un drama politique lourd et ennuyeux, mais Affleck et son scénariste Chris Terrio ont choisi une toute autre voie, celle du thriller cool et désinvolte (ce qu’aurait dû faire Tomas Alfredson avec sa Taupe à l’intrigue imbitable), ou comment associer sans prise de tête espionnage et cinéma en faisant télescoper  James BondMission : Impossible et un soupçon de Star wars.

Argo ne souffre d’aucun temps mort ; c’est bien réalisé, c’est nerveux et c’est sec, et le film aurait pu rejoindre là-haut les grosses pointures du genre s’il ne traînait pas derrière lui un américanisme un peu forcé, principalement dans une vision réductrice des Iraniens (des barbares hargneux, la bave aux lèvres et sans trop de demi-mesure) face à l’exemplarité et l’héroïsme bien connus des Américains. Et puis c’est un peu poussif par moments, avec des scènes accessoires qui n’apportent rien et qui même, au contraire, viennent desservir la crédibilité du film, jusque-là raisonnablement proche de la réalité : le final qui se joue toujours à la dernière seconde, et ce à trois reprises (le coup des billets d’avion, du téléphone et de la photo d’identité reconstituée), la fausse mise à mort, les voitures lancées à la poursuite de l’avion, le drapeau américain flottant négligemment au vent à l’arrière d’un dernier plan…

On pardonne, magnanime, parce qu’Affleck, en dépit du sérieux de l’affaire, insuffle pas mal d’humour à son joujou, mêlant la décontraction à un ton plus didactique. L’intrusion inopinée d’Hollywood (John Chambers, oscarisé pour ses maquillages sur La planète des singes, participa à l’élaboration de la mission) dans cette histoire de chamailleries d’États et d’exfiltration ultra secrète a en tout cas quelque chose d’enthousiasmant et de jouissif (et même d’assez surréaliste), bénéficiant en outre d’un casting affolant qui ravira les amateurs purs et durs de séries télé (Bryan Cranston bien sûr, mais aussi Victor Garber, Kyle Chandler, Zeljko Ivanek, Clea DuVall, Chris Messina, Adrienne Barbeau…). Les vingt dernières minutes, en dépit d’une surenchère dans le suspens à tout prix, ont au moins le mérite d’offrir une tension en surchauffe (on en tord ses doigts et ses accoudoirs) venant clore avec fébrilité ce film "élégant" (ahhh, le look fin années 70…) et rondement mené.

Argo
Tag(s) : #Films

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